jeudi 29 janvier 2009

Trompée de colère ?

Posted in by Arthemesia |


A l'instant, je m'insurgeais contre un article paru dans Le Monde, où Sarkozy se moquait du bac ES, en accusant celui-ci de ne pas pouvoir mener les bacheliers aux grandes écoles d'économie. Son constat, plus qu'objectif, n'était pas la cause de mon emportement, il ne faisait que s'appuyer sur des faits connus depuis de nombreuses années : le bac Scientifique, considéré comme un bac d'élite, mène bien plus d'élèves dans les écoles d'économie, que les détenteurs du bac Economique et Social, qui est sensé nous ouvrir les portes des filières économiques, comme son nom l'indique. Ce qui m'énervait, finalement, c'était qu'il se mette tout à coup à critiquer l'hégémonie de la filière scientifique - qui finalement en forme très peu - alors que le gouvernement est lui-même à l'origine de cette hégémonie.

Ma mère, m'entendant vociférer contre l'écran de l'ordinateur, s'approche pour lire l'article d'elle-même. Ouch, j'aurai du me taire. Elle se met à me donner des leçons de tolérance, d'ouverture d'esprit... enfin je traduis : ses discours de droite, quoi ! A force, vous savez, j'ai appris à habiter sous le même toit qu'une sympathisante de l'"ennemi", chacun ses opinions, tant qu'elle respecte les miennes, ça me va ! Cela dit, quand elle se met à m'attaquer personnellement, cela me met hors de moi. Je peux supporter d'entendre beaucoup de choses, des discours anti-socialistes, anti-anti, anti-manifestants, je m'en fiche, parce que je sais qu'au fond, elle a pertinnament conscience que cette lutte sans fin vaut le coup. Puis, son timide côté apolitique fait qu'elle réfléchira avant de voter à droite, ce n'est pas pour elle un choix par défaut, ou définitif, elle vote par tête et idées et non pour l'étiquette politique.

Donc, je supportais les critiques amères sur le grand méchant parti socialiste, sur la gauche cacaviar... jusqu'à ce qu'elle se taise, et reprenne, d'un air, presque méprisant : "Tu es sûre que tu ne te trompes pas de colère ? Le fait que ton père ne t'ais pas reconnue, tu dois avoir de la haine, forcément, tu y pense parfois." Bam, ça fait mal... Tout ce que j'ai pu répondre à cela, c'est que je n'avais pas de haine, que je n'en avais jamais ressenti pour personne, et que je m'estimais chanceuse d'être épargnée de ce poison violent. En mon for intérieur, je bouillonais. Comment peut-elle mêler un passé, notre passé douloureux avec une affaire de discorde d'opinions politiques ? Si ma propre mère ose des remarques aussi mesquines, je n'ose même pas imaginer les sordides considérations personnelles qu'ont pu/du se sortir les politiques entre eux.

La politique peut être un véritable léviathan : il peut anéantir les sentiments humains...


mardi 20 janvier 2009

Lettre

Posted in by Arthemesia |


A mon père inconnu,

Chaque jour que Dieu fait, je me demande s'il t'arrive de penser à moi. Non pas de regretter, parce que j'en demanderais alors bien trop, mais seulement de songer à mon existence, d'imaginer nos ressemblances, nos différences. Il m'a toujours manqué l'image, l'affection paternelles, je me suis toujours torturée à savoir à quoi tu ressemblais, si tu étais aussi intelligent que maman le prétend. Si tu as un bon coeur, au fond. Si tu méritais qu'elle te défende encore, et qu'elle soit toujours amoureuse de toi, à travers le fruit de son amour, non-réciproque, c'est à dire moi. Moi qui n'ai jamais rien choisi, qui n'ai jamais eu le choix. Je me sens tourmentée, entre l'obligation, presque morale de t'en vouloir et l'envie indolente de t'ignorer. La première solution m'est impossible, je ne peux pas détester quelqu'un que je ne connais pas, pas même de visage, et l'alternative serait comme feindre que je ne souffre pas. Ce qui est faux.

Ces jours qui filent, loin de m'éclairer l'esprit, me troublent plus encore, car mes idées s'emmêlent et se démènent à chercher ce qu'il y a de pis dans mon mal. Parfois, le plus récurrent, c'est le fait de ne pouvoir mettre un visage sur mon géniteur, avec, pour seule consolation de ma mère, l'idée que je puisse m'en faire en regardant attentivement ma face dans le miroir. Dans d'autres jours, l'absence d'affection masculine, qui se montrent parfois sous la forme de pulsions sexuelles typiquement juvéniles (sic). Les autres interprétations de cette douleur, je n'en ai plus le souvenir, elles ne devaient pas être particulièrement pertinentes.

Ce qui est certain, c'est toi, comme ma mère, vous vous êtes montrés égoïstes. Egoïstes, oui, parce que c'est moi qui ai pati de votre histoire, sans début ni fin. Toi, tu n'as jamais pris tes responsabilités, tu ne t'es pas montré clair, et ma mère a vécu dans une totale illusion frisant la niaiserie. Il parait que ma mère n'était pas la seule jeune femme que tu as foutu en cloque, il y en avait une autre, qui a fait le choix d'avorter. Il y a des jours où j'envie l'embryon qui était dans l'utérus de cette femme, ces jours où, on se dit que vivre ne vaut pas la peine de tant de souffrances. Les autres jours, Dieu merci plus nombreux, me font réaliser que sans cette grossesse, à l'origine non désirée, ma mère aurait vécu les quinze dernières années seule, et malade, de surcroît, sans autre (pré)occupation que ses sporadiques bouffées délirantes.

Quoiqu'il en soit, que tu le veuille ou non, tu influe sur ma vie. Peut être bien plus que si tu étais à mes côtés. Cette absence m'aide à me fixer un but, un but précis. A savoir, parvenir à m'installer dans une situation stable qui me permettrait d'être plus forte mentalement à une confrontation. Entre nous deux. Si tu croyais t'être débarrassée de moi, tu te trompes, un jour je te rechercherai. Ce qui est sûr c'est que je ne le ferais pas tant que je ne serai pas installée, je suis une fille très orgueilleuse, tu sais, alors je ne voudrai surtout pas que tu croies que, finalement, au point où j'en suis, je ne valais pas la peine que tu t'occupe de moi. Je voudrais, non pas par vengeance, je te l'assure, mais par amour-propre, que tu regrettes d'avoir perdu tout ce temps, que tu ne pourras jamais rattraper. Et que tu te dise que finalement, ma mère a fait du bon boulot, et qu'elle ne valait pas non plus d'être jetée comme une merde.

Post scriptum : cette lettre respire les non dits, ces choses qui ne parviennent à sortir que difficilement, après une lutte acharnée contre ses propres sentiments. Ces sentiments vicieux qui se font passer pour d'autres. Quoiqu'il en soit, écrite il y a quelques temps, je suis retombée dessus par hasard, je la publie, car malgré toutes ces contradictions, cette lettre, c'est bien moi.

dimanche 11 janvier 2009

Le socialisme face aux réalités

Posted in by Arthemesia |


Il y a environ deux années déjà que je me revendique socialiste, mais, avant l’an passé, je ne m’interrogeai guère que sur son fond, c'est-à-dire à son idéologie vieille d’un siècle et, qu’on peut, aujourd’hui encore, remettre difficilement en question lorsque l’on se considère de gauche. Depuis un an, je me suis rendue compte, en m’intéressant de plus en plus à la politique, qu’une idéologie politique conduit forcément à une doctrine économique résultant des convictions, des principes de cette idéologie. Or, on le sait tous, il est difficile actuellement pour le Parti Socialiste de s’accorder de manière unanime sur cette doctrine devant être le fil conducteur d’une politique socialiste. Sur fond de crise, le débat déchaîne les passions : ancrage à gauche ou revirement au centre, la discussion houleuse ne met d’accord personne.
Je m’interroge beaucoup ces derniers temps, et j’en viens à douter de mes propres opinions. Il y a quelques mois, j’étais favorable au mouvement social démocrate et donc au rapprochement du PS vers le parti centriste, en évitant, cela dit, de dévier vers une politique libérale qui se voudrait sociale (enfin je développerais ce point plus loin). L'idée, en somme, était d'aller 'chercher' l'électorat bayrouiste, sans remettre en cause les principes socialistes. Le contexte était cela dit foncièrement différent, le krach boursier n’avait pas encore fait trembler les plus grandes trust - qu'on pensait invincibles. On sentait cependant l’orage arriver avec la crise immobilière des subprimes. Le mouvement social-démocrate m’apparai(ssai)t alors simplement, peut être naïvement, comme l’avenir de l’Europe, et tel un modèle social et économique pour le reste du monde. Après de nombreuses discussions très intéressantes où j’ai pu prendre connaissance des contre arguments de ce modèle économique, et après m’être renseignée sur le sujet de manière plus approfondie, des doutes sont apparus, me laissant sur le carreau, un peu incapable de donner mon opinion et de me situer précisément politiquement, enfin disons économiquement.


Gare au passéisme ou à la droitisation ?

Les uns s’insurgent contre le flirt du PS avec le centre, et voit là une 'droitisation' de la gauche, d’autres pensent que l’acceptation de l’économie de marché est inévitable, ou, plus poussé encore, ne croient plus en l’avenir du socialisme, qu’ils considèrent comme une idéologie dépassée (Manuel Valls). Mais, dans ces cas, peut-on se revendiquer encore du parti socialiste lorsqu’on souhaite un rapprochement vers les communistes ? Pis encore, peut-on continuer à adhérer à un parti politique, dont on considère l’idéologie fondatrice dépassée ? Quoiqu’il en soit, la mondialisation gronde, l’économie mondiale périclite et la plupart des socialistes, aspirant à un nouveau modèle et à la rénovation du parti, sont impitoyablement oubliés par ces changements. Cette mondialisation souvent incriminée, mais hélas inévitable, insuffle un vent de panique et de bouleversement de l'ordre mondial, se traduisant, à l'échelle macroscopique, par une remise en question idéologique.


Social démocratie, social libéralisme…

Revenons-en au vif du sujet, à ce fameux modèle économique tant recherché, espéré. La social démocratie, reconnaissant que l’économie de marché et donc les investissements privés permettent de créer la richesse, propose de fonder une Europe fidèle à de nombreux principes : l’équité de l’ordre social garantie par la richesse produite taxée, l’Etat pouvant intervenir, moraliser et réguler le capitalisme, s’appuyant donc sur l’Etat-Providence de Keynes. Investissements dans les technologies de développement durable, l’écologie. En certains points, fondamentaux, il se démarque du libéralisme : on ne parle pas de Libre Échange, qui a (pour certains, et moi même) une connotation négative, mais de Commerce Equitable, avec le maintien d’un service publique omniprésent sur les plans éducatif, sanitaire, de transports, etc.

Il n’y avait alors qu’un point qui me semblait plus ou moins problématique, c’était l’idée de faire de l’Europe une union fédérale. J’avais à l’esprit que le fédéralisme permettrait à chaque État d’acquérir une certaine autonomie, ce qui, finalement est contraire à l’idée d’unité d’un bloc européen. Finalement, le fédéralisme n’est pas ce qui est de plus problématique, à terme, dans la vision social démocrate. Le fédéralisme permet, finalement, au contraire une plus grande démocratie dans les politiques nationales, choisies par le vote du peuple. En revanche, la mondialisation s'oppose à l'Etat-Providence, ce qui explique la disparition progressive de celui-ci dans de nombreux pays d'Europe, contraints de répondre à la compétitivité mondiale. En somme, les pays libéraux ne voudront pas fixer leurs taxes au même niveau que ces Etats Providence, et cette différence crée une fuite du capital. On sacrifie l'Etat social au profit du capital, seul maître en ce bas monde.

Ce frein à la social démocratie aboutit fatalement à une nouvelle conception du socialisme, bien plus controversée par les antilibéraux (tout comme moi) : le social libéralisme. L’idée même d’un libéralisme social ou inversement est forcément contradictoire. Au lieu d’un service étatisé, le social libéralisme se contente de faire un semblant d’égalité sociale, par compassion ou pour avoir bonne conscience – qui sait, par des aides financières tirées des bénéfices, mais attention, pas trop quand même, il faut qu’il en reste assez pour les « profiteurs ». Un exemple volontairement exacerbé : au lieu d’une éducation nationale gratuite et accessible à tous, on privilégiera les bourses accordées aux plus défavorisés pour leur permettre de se payer une école privée, quand l'Etat se sera déresponsabilisé de l'école publique. Le plus inquiétant, c’est que ce soi disant socialisme est dépendant de la santé des marchés financiers. Comment faire perdurer l’égalité en cas de crise financière/économique ? Peut-on affirmer que les acteurs de ce pseudo libéralisme au service du socialisme ne seront pas encore et toujours tentés par les sirènes du profit ? Et dans le cadre d'une social démocratie, qui fixerait les règles sensées apporter plus de vertu au capitalisme ? Comment les imposer et comment pouvoir faire confiance ? La finance n'est-elle déjà pas suffisamment irrationnelle sans apporter une notion comme la confiance, qui est loin d'être basée sur la raison ?


L'extrême gauche… des valeurs sûres ?

Je me renseigne très peu sur les partis communistes, étant sceptique dès le départ, car très réticente aux partis d’extrêmes de manière générale. Cependant, j’ai toujours également considéré les communistes comme les garde-fous de notre société. Sans profonde conviction, mais d’une pensée sincère, les communistes me paraissent encore indispensables à la défense des travailleurs, et des couches sociales moyenne et modeste. De plus, je reconnais en Besancenot une qualité assez incroyable à rassembler et à dépoussiérer l’image du communisme, ou de l’anticapitalisme. Toutefois, mon scepticisme est d’autant plus grand que j’ai l’impression que leurs idées politiques –pas leur idéologie– sont basées sur du conditionnel. Et si les Etats-Unis basculait communistes, le monde se porterait bien mieux. Et si le marxisme était appliqué, l’homme ne serait plus exploité par l’homme. Mais le problème fondamental du communisme est posé : pour que le système communiste fonctionne, il faudrait que tous les pays entrent dans ce système. Communisme ou capitalisme ont besoin du même moteur finalement pour fonctionner : le Monde entier. La réalité est quoiqu'il en soit celle-ci : on est en pleine mondialisation, c’est l’économie de marché qui gouverne - et qui a l'air d'avoir encore de beaux jours devant elle - et tout cela n’est pas prêt de changer.

Alors, en attendant, on fait quoi ?