lundi 26 mai 2008

Contemplation #2

Posted in by Arthemesia |


Je suis assise et je contemple, à travers le verre épais et étanche, la nature absorbée par la vitesse du train. Ce paysage qui s'étend à l'infini et que je tente de capturer, m'échappe, fatalement. Les saules pleureurs paraissent enfoncer leur immense tronc sous le sol humide, un peu chaud. Comme j'aimerais sentir ces suaves odeurs, d'ici et d'ailleurs : de la terre fertile, des étendues de plaines d'herbes folles, des arbres seigneurs de leur grand territoire mugissant sempiternellement contre le vent, puis les senteurs exotiques de ces terres arides et rouges ; des pierres froides et précieuses, aux mille et une facettes éblouissantes, raffinées et brutes à la fois, provenant de contrées méconnues. Ce désir qui s'éveille en moi m'émeut ; il y a longtemps que je n'ai pas entendu le bruit sourd de la nature reine respirer. Dans la cabine de mon train, l'air me manque, je souffre de cette opacité et je ne puis comprendre l'allégresse qui m'entoure. Je m'ennuie de la monotonie de cette cadence, qui me fait souvent chanceler. J'ai l'impression de manquer le spectacle naturel qui s'offre généreusement, sous mes yeux concentrés : les branches des peupliers s'agitent, les feuilles vert pastel des saules s'embrassent et se quittent pour dévoiler les protagonistes de ce théâtre qui me parait silencieux, auquel les animaux de la forêt participent, enthousiastes. J'imagine la douce mélodie que provoque le vent sur les délicates feuilles aux reflets dorés et pourpres, et la force du craquement des branches qui crissent et gémissent, mélancoliques. Deux rouges-gorges se disputent une place, l'un semble donner un coup de bec à l'autre, la canaille ! Tout va si vite ; maintenant apparait un renard au soyeux pelage qui a l'air de penser : "Quel beau temps aujourd'hui !", puis il disparait, sombre dans l'oubli. Absorbée par ce paysage qui défile sous mes yeux émerveillés, je crois entendre le cri d'un corbeau ; ce cri indigné par cet écoulement imperturbable de la vie ! Je me languis d'en voir immédiatement davantage... mais quel désespoir ! le temps s'écoule, il est trop tard, le train arrive déjà en gare.

dimanche 11 mai 2008

Comme si c'était la dernière fois

Posted in by Arthemesia |

Lorsque j'émergeai de mon immeuble, je sentis une légère brise, celle qui annonce l'été triomphant, et des frissons parcoururent ma peau car ce jour-là je sentais les choses telles qu'elles l'étaient vraiment, et non pas comme je les ressentais fadement auparavant, à cause de cette perception stérile engendrée par la routine. Du haut de la rue du chemin vert, on apercevait la tour Montparnasse, et pour une fois, je considérai cette vue autrement qu'à l'ordinaire : je m'émerveillai de tout ce que mes sens étaient capables de percevoir. Le soleil avait l'opale d'une perle et les facettes d'un diamant. Cette cruelle lumière me sembla comme une immuable fatalité : celle du temps perdu. Au fond de moi, j'avais toujours pensé qu'un jour Paris m'échapperait et que l'amertume du temps passé me ferait regretter de n'avoir jamais su explorer les recoins de cette ville.